Shmuel Yossef Czaczkes est né à Buczacz, une bourgade juive de Galicie orientale, en 1888. Son père, commerçant en fourrure, un Juif orthodoxe mais assez ouvert et modéré lui transmit les valeurs traditionnelles du Judaïsme. C’est sa mère qui lui donna le goût de la culture et de la littérature européennes.
Agnon commence à écrire dès son plus jeune âge: “Le moindre papier qui tombait entre mes mains se couvrait d’une poésie ou d’une historiette”. A 16 ans il publie son premier poème et ne cessera plus d’écrire, que ce soit en hébreu et en Yiddish.
A 19 ans, il arrive en Palestine, s’installe à Jaffa et se rapproche des cercles pionniers sionistes-socialistes. “Femmes délaissées”, en hébreu “Agounot”, son premier récit publié dans le pays est chaleureusement accueilli. C’est alors qu’il hébraïse son nom en Agnon d’après le titre du livre.
Il part pour l’Allemagne en 1913; c’est là qu’il connaîtra et épousera Esther Marx, d’une famille juive allemande très connue et qu’il se liera d’amitié avec Zalman Schoken lequel deviendra son éditeur. En 1924, après qu’un incendie ait détruit sa bibliothèque et tous ses manuscrits, Agnon revient s’installer, cette fois à Jérusalem et il retourne définitivement à la pratique religieuse. C’est là que jusqu’à la fin de sa vie, en 1970, il poursuivra son oeuvre littéraire.
En 1966, il sera le premier Israélien à recevoir le Nobel de littérature pour “son art tout particulier du récit, profondément imprégné de motifs de la vie du peuple juif.”
A la veille de la cérémonie du Nobel, il se confie: “Qui sont mes maîtres en poésie et en littérature? Qui m’a influencé? Chaque homme, chaque femme, chaque enfant rencontrés sur mon chemin, Juifs ou non-Juifs; leur conversation, le récit de leurs faits et gestes se sont gravés en moi pour réapparaître sous ma plume”.
Agnon a publié de son vivant 8 volumes de romans, de nouvelles et de récits auxquels s’ajoutent maintenant huit autres volumes publiés après sa mort. Son oeuvre nous entraînent en Galicie, en Allemagne et en Israël. Parmi ses livres les plus connus: “La fiancée”: épopée sur la vie juive en Galicie au 19ème siècle.
“L’Hôte de passage”: sur le déclin de la vie juive dans les bourgades de Pologne, et où certain voient une prémonition de la “Shoah”.
“Hier et avant-hier”: une oeuvre chargée d’ombres et de couleurs sur les pionniers venus d’Europe au début du siècle.
“Contes de Jérusalem”: des personnages féeriques, dans la Jérusalem des années quarante.
La langue d’Agnon, très originale, est un mélange unique en son genre d’hébreu talmudique, médiéval, hassidique et moderne.
Agnon est un artiste au regard aiguisé; il tient son lecteur en haleine, peut surprendre et parfois choquer, avec un humour qui frise le grotesque où il est parfois difficile de discerner le réel de l’imaginaire.
Shimon Peres est né à Vishneva, en Pologne, en 1923. Arrivé dans la Palestine d’alors à l’âge de 11 ans, il étudie à l’école “Géoula” de Tel-Aviv puis dans le village de jeunes de Ben-Shemen. Membre d’un mouvement de jeunesse pionnière, il rejoint, avec son groupe, le kibboutz “Aloumoth” en Galilee et s’adonne à l’agriculture.
A la veille de l’indépendance, David Ben-Gourion, qui a remarqué les capacités du jeune homme, lui confie des missions de sécurité délicates; Peres se distingue rapidement par son intelligence et ses qualités d’organisateur hors pair et Ben-Gourion en fait son homme de confiance au ministère de la défense. En quelques années, Peres en devient le directeur général jusqu’à sa nomination comme vice ministre de la défense. Pendant toutes ces années, son souci essentiel sera d’assurer l’approvisionnement d’Israël en armement sophistiqué et en pièces de rechange, d’abord de l’extérieur puis par la mise sur pied une industrie militaire nationale, dont surtout la célèbre industrie aéronautique. Il utilise ses relations personnelles, surtout en Europe occidentale, pour poser les bases d’une infrastructure de recherche nucléaire israélienne.
A la suite de la crise que provoque la Guerre de Kippour, Shimon Peres devient ministre de la défense dans le premier gouvernement Rabin et il prend l’initiative de l’ “Opération Jonathan” pour libérer les hôtages israéliens kidnappés à Entebe, en Ouganda.
Apres l’arrivée de Menahem au pouvoir, Peres, à la tête des travaillistes défaits, prend sur lui de rénover son parti; lui, depuis toujours identifié avec la tendance “faucon”, déclare ouvertement que la conjoncture internationale a changé et que l’Etat d’Israël est assez fort pour tenter la chance de participer à un “nouveau Moyen Orient” pacifique.
Dans le gouvernement d’Union nationale de 1984, il sera Premier Ministre pendant les deux premières années et, en vertu de l’accord de rotation, il passera la main à Yitzhak Shamir et sera, successivement, ministre des Affaires étrangères puis ministre des finances.
En 1992, la victoire des travaillistes conduits par Yitzak Rabin ramènera Shimon Peres aux Affaires Etrangères. Après des années d’animosité entre les deux hommes, se créé entre eux une division du travail qui se transformera en collaboration loyale et même en amitié pendant les mois qui précèdent l’assassinat de Rabin.
Peres met toute son énergie en vue de renforcer le processus de paix, commencé à la conférence de Madrid en 1991. Il agit aussi bien par voie diplomatique officielle que par contacts secrets, par la presse ou par les livres. Ses efforts seront couronnés de succès; par l’intermédiaire du ministre norvégien des Affaires Etrangères, un tournant historique, qui met fin à un siècle de haine et de lutte, s’amorce à Oslo avec l’ouverture d’un dialogue direct entre l’Organisation de Libération de la Palestine dirigée par Arafat et l’Etat d’Israël. En septembre 1993, un accord de principe est signé à Washington sur un arrangement étagé sur 5 ans qui doit conduire à une solution pacifique définitive entre les deux peuples.
La perspective d’une solution négociée du problème palestinien permettra, en octobre 1994, la signature d’une paix globale entre Israël et le Royaume de Jordanie et un processus lent mais irréversible de normalisation entre Israël et la majorité des pays arabes.
Le prix Nobel de la paix, expression de la reconnaissance internationale face à ce bouleversement historique, couronnera en 1994 Ytzhak Rabin, Shimon Peres et Yasser Arafat, pour le courage avec lequel ils dominèrent toutes les difficultés sur la voie de la paix.
Cependant le processus de paix se heurta à l’opposition des fanatiques des deux camps; face à un terrorisme arabe accru, les milieux religieux et nationalistes extrémistes menèrent une campagne hystérique qui atteint son apogée avec l’assassinat d’Yitzhak Rabin le 4 novembre 1995. Cette fois, il apparut comme évident que Shimon Peres était l’homme de la situation pour diriger Israel à cette heure dramatique et chargée d’espérance. La Knesseth entérina sa nomination comme chef du gouvernement sans presque d’opposition et Shimon Peres exprima sa volonté inflexible de continuer et de renforcer le processus de paix avec tous les peuples arabes voisins.
Yitzak Rabin est né à Jérusalem en 1922. Il étudie à “l’école des enfants d’ouvriers” de Tel-Aviv puis à l’école d’agriculture “Kadouri”. Il s’engage en 1940 dans les commandos de choc du “Palmah” et participe comme combattant et comme officier à de nombreuses actions militaires. En 1947, Rabin devient l’adjoint en chef des commandos du “Palmah”, et en 1948, il n’a alors que 26 ans, il commande la brigade “Harel” qui dégage la Jérusalem juive encerclée.
Avec la création de Tsahal, l’Armée de Défense d’Israël, il remplit des fonctions de grande responsabilité jusqu’à sa nomination au poste de septième chef d’Etat-Major israélien en 1964. En 1967, c’est donc lui qui remporte la grande victoire éclair de la Guerre des Six-Jours contre les armées égyptiennes, syriennes et Jordaniennes et qui réunifie la ville de Jérusalem. Son discours de récipiendaire du doctorat “honoris causa” de l’Université hébraïque sur le Mont Scopus est resté comme le symbole des principes humanistes qui se doit d’animer un soldat juif.
En 1968, Rabin quitte l’uniforme pour l’ambassade de Washington. En 1973, il entre à la Knesseth et devient pour quelques mois ministre du travail dans le gouvernement Golda Meïr. A la suite de la Guerre de Kippour, Golda Meïr démissionne et Yitzhak Rabin se trouve soudain investi du poste de chef du gouvernement. C’est à ce poste qu’il signe les accords de séparation des forces avec l’Egypte et la Syrie.
En 1977, Rabin démissione et c’est seulement en 1992, avec la victoire du parti travailliste, qu’il redevient premier ministre. Il s’engage solennellement à promouvoir le processus de paix avec les pays arabes, entamé à la conférence de Madrid en 1991.
Le plus succès le plus manifeste du gouvernement Rabin restera le tournant historique dans les relations israélo-palestiniennes et l’ouverture, après un siècle de haine et de violence, de négociations directes qui conduisirent, en septembre 1993 à Washington, à la poignée de main Rabin-Arafat lors de la signature de l’accord de principe sur un accommodement de cinq ans à la suite duquel sera négocié l’accord de paix permanent entre Israël et les Palestiniens.
La perspective d’une solution juste du problème palestinien a ouvert la voie à la signature d’un accord de paix complet entre Israël et le royaume de Jordanie, en octobre 1994 et au début d’un processus de normalisation avec la majorité des pays arabes.
A la suite de ce bouleversement historique, Yitzak Rabin, Shimon Peres et Yasser Arafat ont reçu ensemble, en 1994, le Nobel de la Paix en hommage au courage avec lequel il ont surmonté tous les obstacles sur le chemin du dialogue.
Cependant le processus de paix avec les Palestiniens se heurta, d’un coté, à un renforcement du terrorisme arabe et, de l’autre à une contestation virulente de l’opposition de droite et des milieux religieux extrémistes en Israël.
Le samedi 4 novembre 1995, à la fin d’une grande manifestation des partisants du processus de paix, un membre d’un groupuscule de l’extrème droite religieuse, réussit à s’infiltrer parmi les agents du service de sécurité et assassina Yitzak Rabin de trois balles de révolver. Un immense deuil enveloppa toute la population israélienne et une grande affliction face à la disparition d’un dirigeant aussi énergique que populaire, l’homme qui avait conduit son peuple au combat et qui le guidait maintenant vers la paix. La mort d’Yitzak Rabin fut l’occasion pour les jeunes israélien d’exprimer leur identification avec celui qui symbolise le “Sabra”, l’Israélien nouveau et l’occasion d’affirmer la volonté pacifique de la jeune génération de l’Etat d’Israël.